La lâcheté au bras de l’hypocrisie

« Tout à coup une porte s’ouvre : entre silencieusement le vice appuyé sur le bras du crime. M. de Talleyrand marchant soutenu par M. Fouché ; la vision infernale passe lentement devant moi, pénètre dans le cabinet du roi et disparaît ».

Cette citation célèbre de Chateaubriand me semble d’une criante actualité aujourd’hui.

Pour l’hypocrisie, nous en avons ces jours-ci, heure après heure, des manifestations éclatantes : la dernière en date est la phrase « le pouvoir que tu nous as donné … », qui fait le pendant du « Dieu merci les faits sont prescrits » devenu célèbre !

Il n’est donc pas nécessaire de s’y attarder. Mais pour ce qui concerne la lâcheté, on peut en faire un inventaire, partiel mais édifiant :

L’église romaine

L’église romaine communique, à genoux parfois, la main sur le cœur, « nous ne savions pas », « nous ne soupçonnions pas l’ampleur du phénomène », « je savais que c’était un péché mais je ne savais pas que c’était un crime »…

Est-ce qu’il s’agit d’hypocrisie ? Ou – plus effarant encore – ne serait-ce pas juste de l’inconscience, comparable à celle de la haute noblesse au moment de la Révolution : « mais qu’est-ce qu’ils veulent ? Nous avons convoqué une commission, tout de même ».

L’église réformée

En pointe ?

Le protestantisme a longtemps été en pointe sur de nombreux thèmes : la laïcité, le combat pour la contraception et l’avortement, la libération des addictions, la lutte pour l’indépendance des pays colonisés, l‘émancipation d’attitudes religieuses et des croyances d’un autre temps. On pouvait dire que le protestantisme nous avait appris la liberté.

Aujourd’hui, l’église protestante… etc. reste dans un silence assourdissant : elle se contente de publier un fascicule pour informer sur la pédophilie qui pourrait apparaître dans les églises locales.

La fédération protestante, quant à elle, décrit de façon lénifiante l’actualité du mois d’octobre : Les principaux sujets du mois d’octobre :  Présence protestante, actes du colloque de 2019, Les évangéliques, racines, identités, engagements et secrétariat… 

Et le journal Réforme répercute les déclarations des évêques et de leur président…

Et quand on suggère d’initier des temps de réflexion sur le sujet, voici ce qu’on peut obtenir : « laissons le peuple catholique faire le ménage chez lui » !

Et la compassion ?

Est-ce qu’on constate la moindre compassion pour les victimes, pas même des intentions de prière, des démarches publiques de soutien ? J’ai même trouvé des demandes de prières « pour l’église catholique», mais POUR LES VICTIMES ?

Un homme a déclaré « avoir été sodomisé par un prêtre à de nombreuses reprises pendant trois ans » est-ce que ça ne mérite pas un peu d’attention ? De compassion ? D’indignation ? Ou est-ce que nous protestants sommes devenus, sous couvert d’œcuménisme, une simple chambre d’enregistrement endormie ?

La justice

L’église romaine a fait appel à une commission « indépendante » (la CIASE) pour recueillir des témoignages, et elle a constitué une commission « indépendante » pour régler la question des indemnisations.

Mais, nous ne sommes pas dans un pays mafieux qui règle ses problèmes en interne, nous sommes en France, un pays où il y a un code pénal, où il y a des tribunaux et où nul n’est censé échapper à la loi.

Que fait donc le parquet ?

Que fait le défenseur du droit auprès des enfants ? Après tout, Le site du service public indique que parmi les domaines d’intervention du défenseur des droits des enfants figure la « justice chargée d’appliquer les sanctions découlant du code pénal (contravention, délit, crime) »

Est-ce que les pouvoirs publics se désintéressent des victimes ? Se désintéressent des dérives constatées dans le fonctionnement d’une institution qui, au long des années, des siècles, est devenue un état dans l’état, une zone de non-droit ?

Pour finir

Terminons par une autre citation de Chateaubriand : “Il est des temps où l’on ne doit dépenser le mépris qu’avec économie, à cause du grand nombre de nécessiteux.”

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